Souvenirs historiques
April 10, 2025

Napoléon triomphe toujours aux enchères : retour sur le personnage historique préféré des collectionneurs

Napoléon triomphe toujours aux enchères : retour sur le personnage historique préféré des collectionneurs

Article publié pour le magazine des Enchères

Chapeau, mèche de cheveux, bottes, chemise et chaussettes, les effets personnels de Napoléon Bonaparte se disputent toujours aux enchères en France. Fétichisme pour certains, témoignages historiques de l’intimité de l’homme qui fit trembler l’Europe pour d’autres, ces souvenirs ne laissent personne indifférent. Encore moins les médias qui ont bien conscience de la notoriété mondiale du personnage et qui relaient régulièrement la vente de ses souvenirs.

Si un objet devait résumer cette ferveur, il s’agirait du chapeau de l’Empereur. Indissociables de la silhouette du petit caporal, les chapeaux lui ayant appartenu sont très rares en mains privées. Les deux ayant atteint des records d’enchères sont celui provenant des collections du Musée napoléonien de Monaco, adjugé 1 884 000 euros par Binoche-Giquello-Osenat en 2014, et celui de la collection Noisiez (ancienne collection Brunon) adjugé 1 932 000 euros chez Osenat en 2023.

Adjugé à 1 932 000 €
Adjugé à 1 884 000 €

Au plus près de l’Empereur : le marché des reliques

Le linge usuel de l’Empereur n’est pas en reste, et c’est toute la garde-robe rapportée par les compagnons d’infortune qui réapparait au gré des ventes. Les chemises sont les plus recherchées, plusieurs ont été adjugées en salles des ventes entre 50 000 et 100 000 euros. Ses bas ou ses mouchoirs oscillent quant à eux entre 5 000 et 15 000 euros.

Les mèches de cheveux qui, rappelons-le, ne sont pas touchées par le principe d’indisponibilité du corps humain (et donc l’interdiction de vente), se retrouvent également assez régulièrement en ventes publiques. Si de son vivant, l’Empereur n’aimait pas que l’on puisse récupérer des reliques, ses cheveux furent rasés à sa mort pour faire son masque mortuaire et furent partagés entre les compagnons de son exil. Aux enchères, on retrouve néanmoins certaines mèches prélevées du vivant de Napoléon et donc beaucoup plus rares, comme celle prise en 1815 à bord du Northumberland et adjugée 9 240 euros par Samuel Boscher en 2022, ou encore celle offerte au coiffeur Michalon par le valet Constant et vendue 18 750 euros par Osenat en 2019. Cette dernière mèche était accompagnée d’une lettre signée du valet de l’Empereur, expliquant la rareté de ces souvenirs : « Regardez ce cadeau pour très précieux, car je n’ai jamais voulu en donner malgré les demandes réitérées que l’on m’a faites. »

Il est à noter que les uniformes de l’Empereur et sa célèbre redingote n’ont pas été confrontés au feu des enchères : les seuls exemplaires connus sont conservés dans les musées nationaux ou dans les collections impériales.

Adjugé à 88 200 €
Adjugé à 18 750 €
Adjugé à 9 240 €

Quand le personnage historique rencontre l’objet d’art

A côté de ces souvenirs personnels collectés par les proches de l’Empereur, les objets offerts par le souverain ou ceux utilisés pour son usage personnel sont particulièrement recherchés. Ils sont les symboles d’un artisanat français admiré dans toute l’Europe sous l’Empire. Ainsi en est-il des assiettes de Sèvres du service à dessert de l’Empereur dites « des quartiers généraux » qui sont des objets transversaux par excellence. Transversaux, parce qu’ils mêlent la céramique, la peinture et le souvenir historique. Ces assiettes ont été produites durant l’Empire par la Manufacture de Sèvres, alors à son apogée. Les centres étaient peints par les artistes de la Manufacture, sur des sujets définis par l’Empereur lui-même qui souhaitait « que parmi ces dessins, il n’y ait point de bataille ni de noms d’hommes mais qu’au contraire, les sujets n’offrent que des allusions très indirectes qui réveillent des souvenirs agréables ». Les thèmes évoqués sont dès lors napoléoniens et historiques. Parmi les dernières assiettes vendues aux enchères, on retrouvait pêlemêle la tente de l’Empereur en 1809, une vue de la rotonde d’Apollon au Louvre, la Manufacture de Sèvres ou encore l’entrevue avec le Tsar Alexandre Ier sur le radeau de Tilsitt. Le service connut une histoire agitée : il fut conservé par Louis XVIII qui fit ajouter son chiffre au dos des assiettes, puis emmené par l’Empereur à Sainte Hélène, qui en fit don à ses compagnons.

Les exemples de ce type d’objets impériaux et transversaux sont multiples. Un insigne de chevalier de la Couronne de Rue, le plus important ordre saxon, ayant appartenu à l’Empereur Napoléon Ier sera ainsi présenté aux enchères le 1er avril chez Artcurial. Il s’agit d’un ordre de chevalerie, mais surtout d’un souvenir historique. Ce bijou en or et émail fut pris dans l’une des berlines de l’Empereur Napoléon Ier par les prussiens, puis acheté par le Prince Louis II de Monaco, avant de rejoindre une collection privée après la dispersion des collections en 2014. A noter que l’orfèvrerie de l’Empereur par Biennais ou les boîtes de présent à son chiffre se retrouvent également régulièrement en salle des ventes, mêlant orfèvrerie et histoire.

Adjugé à 512 500 €
Adjugé à 306 250 €
Adjugé à 243 750 €
Estimé 30 000 € - 50 000 €

Les armes personnelles du souverain atteignent elles aussi des sommets en vente publique, à l’instar du sabre de l’Empereur Napoléon Ier à Marengo qui a établi un record en 2007 chez Osenat. Réalisé par Boutet à la Manufacture de Versailles et provenant des descendants de son frère Jérôme Bonaparte, à qui l’Empereur l’avait offert vers 1805, ce sabre a été vendu pour 4,8 millions d’euros aux enchères. Là encore, l’objet d’art d’exception rencontre l’illustre provenance. Il en est de même pour le coffret nécessaire de deux pistolets réalisés par Gosset et ayant appartenu à l’Empereur Napoléon Ier qui a trouvé preneur à 1,69 million d’euros en 2024 lors d’une vente organisée par Rossini et Osenat. Il avait été offert par Napoléon au général Armand de Caulaincourt, duc de Vicence, dans la nuit du 12 au 13 avril 1814. La raison d’un tel résultat ? Une belle qualité d’exécution, mais surtout une histoire exceptionnelle racontée par le général de Caulaincourt lui-même : l’Empereur aurait voulu mettre fin à ses jours avec ces armes avant d’opter pour le poison. La tentative n’aboutira pas et Napoléon fera don de ses pistolets à son ami.

France, époque Premier Empire (vers 1810-1812). Coffret de pistolets réalisé par Gosset, plaqué en ronce de noyer, intérieur en velours brodé. Contenant deux pistolets richement décorés. Adjugé 1 690 000 euros par la maison Osenat, à Fontainebleau, le 7 juillet 2024.

La provenance, clé de voûte d’un marché exigeant

La provenance et la traçabilité dans le temps de ces objets personnels de l’Empereur Napoléon Ier sont extrêmement importantes, à l’image des autres secteurs du marché de l’art. Ainsi, le linge intime et nombre de souvenirs personnels viennent des compagnons de l’exil de Sainte Hélène qui se partagèrent les derniers effets de l’exilé. Ce sont leurs noms que l’on retrouve pour la provenance de ces souvenirs : les généraux Bertrand, Gourgaud, Montholon, le valet Marchand ou les serviteurs plus modestes comme Ali ou les frères Archambault.

Les souvenirs plus importants furent quant à eux inventoriés par Napoléon durant son exil et légués par son testament à sa mère, ses frères et sœurs d’une part ; et à son fils le Roi de Rome d’autre part. Ce dernier leg ne put être honoré – le jeune homme meurt prématurément en 1832, et les objets sont donnés en partie à la famille Bonaparte.

Maints souvenirs importants de l’Empereur Napoléon Ier se trouvent aujourd’hui dans la descendance des familles des dignitaires et artisans du Premier Empire. Ainsi en est-il d’une modeste feuille de lauriers de la couronne du Sacre de quelques grammes qui, provenant des descendants de l’orfèvre Biennais, fut adjugée pour près de 650 000 euros par Osenat en 2017. L’Empereur n’a pas fini de faire parler de lui…

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